Le Kaiser de la mode fera prochainement l’objet d’une mini-série sur Disney +
05 septembre 2022
Karl Lagerfeld et la mode : une histoire française
qui retracera en six épisodes son destin exceptionnel. L’occasion pour FRENCHR de revenir sur la carrière du plus allemand des couturiers français
et sur son rapport à la France.
et sur son rapport à la France.
Un Allemand à Paris
Né à Hambourg dans une famille aristocratique, Karl Lagerfeld apprend très vite le français. « À l’âge de cinq ans, j’ai demandé un prof de français parce que je trouvais dégradant de ne pas saisir ce que disaient mes parents lorsqu’ils ne voulaient pas que je les comprenne. (…) À six ans, je parlais allemand, français et anglais ». Au point de corriger régulièrement son professeur de français sur sa prononciation et sa conjugaison.
Mais au-delà de la langue française, Lagerfeld admire les lignes élégantes et le savoir-faire des marques de haute couture françaises. Il garde un souvenir mémorable d’un défilé Christian Dior de décembre 1949 organisé dans sa ville natale, auquel il assiste avec sa mère Elisabeth.

Ainsi, le Karl Lagerfeld déménage ensuite à Paris en 1952 et vit rue de la Sorbonne. Il passe ses journées à dessiner, des croquis de mode et des caricatures. Il n’a pas encore choisi sa voie. Mais Lagerfeld ne tarde pas à découvrir qu’à Paris « l’essentiel dans la vie – je parle des années 1950 – c’était d’être bien habillé ».
Mais sa vie bascule deux ans plus tard. Il remporte, ex æquo avec un certain Yves Saint Laurent, le concours du Secrétariat international de la laine organisé par la marque Woolmark et la chambre syndicale de la couture parisienne.
Karl Lagerfeld : le « mercenaire de la mode »
C’est alors le début d’une longue carrière. Pierre Balmain, membre du jury du concours international de la laine, recrute Karl Lagerfeld tout d’abord comme assistant. Ce fut selon lui le meilleur endroit pour faire ses classes : « Pendant trois semaines, après chaque collection, quinze heures par jour, je dessinais. Je peux vous dire, peu de jeunes gens accepteraient cela aujourd’hui – je l’ai fait pendant trois ans et demi – mais c’était la meilleure formation. Maintenant je peux esquisser des robes les yeux fermés ». Le couturier allemand entre ensuite en 1959 chez Patou. Puis dans les années 1960 Lagerfeld travaille pour la maison Chloé. Puis il devient le directeur artistique de Fendi en 1965 et enfin de Chanel en 1983. Il choisit alors Inès de la Fressange comme égérie. Ceci pour sa ressemblance avec Gabrielle Chanel et pour son style désinvolte, typiquement français.
Lagerfeld et Chanel
Lagerfeld relève à lui seul la maison Chanel, alors en difficulté, et en fait rapidement un empire mondial. Il reprend les codes de la marque, la veste en tweed, le sac matelassé, les camélias, et les modernise.
À cette fin, il s’appuie sur le savoir-faire des ateliers français, comme Lemarié pour la plumasserie, Lesage pour la broderie, Causse pour la ganterie, Massaro pour la botterie ou encore maison Michel pour la chapellerie. En outre, chaque automne depuis 2002 Chanel, sous l’impulsion de Lagerfeld, présente ainsi son défilé des Métiers d’Art pour mettre en avant l’excellence des artisans français.
Et pour le décor de la collection haute couture automne hiver 2016-2017, le directeur artistique de la maison décide de rendre hommage à l’équipe Chanel et de plonger les spectateurs dans les ateliers de la marque. Il fait venir les petites mains et les premières d’atelier sous la coupole du Grand Palais, avec leurs machines et leurs rouleaux.
« On est dans le grand luxe et c’est amusant que les gens voient comment il se fabrique, c’est fait comme il y a cent ans. Mettre en avant ce travail permet de comprendre « pourquoi c’est si cher » », explique Karl Lagerfeld après le défilé. « C’est vraiment artisanal, ce n’est pas des pièces débitées comme ça. Je n’ai rien contre la fast fashion mais c’est une autre histoire ! ».
Karl Lagerfeld chez Chanel (directeur artistique) en 1983
Promouvoir le savoir-faire français
Karl Lagerfeld sera à jamais associé à la maison Chanel, incarnation de l’élégance et du style à la française, et au luxe. « Si moi je ne défends pas le luxe, autant partir », déclarait Karl Lagerfeld selon lequel « il y a une French Touch qui se voit tout de suite » sur un vêtement. Le luxe français et le made in France ont encore selon lui « un côté mythique, magique », envié dans le monde entier. « Pour le moment, nous sommes encore imbattables, mais c’est une bataille, parce que les autres, ce n’est pas l’envie qui leur manque », estime-t-il. Si « la France est connue pour ses vins, sa cuisine très luxueuse, la mode, les parfums et les bijoux », le couturier a longtemps regretté que les Français ne valorisent pas davantage ces industries.
Au point de penser que, au fond, seul un étranger pourrait rendre suffisamment hommage à l’artisanat français, et de voir les choses en grand, en faisant par exemple entrer la tour Eiffel dans le Grand Palais pour son défilé automne-hiver 2017.
« Je suis un étranger et fier de l’être. Et nous, étrangers, voyons comment vit vraiment la France. Et nous voyons comment la France et son image ont évolué ces derniers temps. Tout le monde veut venir à Paris, vivre en France, apprendre à parler le français à nouveau. Et je trouve ça formidable ! Quand on n’est pas français, on voit les choses clairement, avec un regard détaché, sans chauvinisme ou patriotisme. Et voici ce que je veux dire : Vive la France ! Vive Paris ! », résumait-il.